Écrit par David Cassin et Adam Walji
Dans l’affaire Taylor v Salytics Inc., 2025 ONSC 3461 (Taylor), la Cour supérieure de justice de l’Ontario insiste sur l’importance d’interpréter un contrat de travail sur le fond, statuant qu’une clause de mise à pied temporaire ne peut être assimilée à une clause de licenciement, dispositions dont la validité est donc indépendante l’une de l’autre.
Cette décision est importante pour les employeurs, car elle met en lumière une limite raisonnable à l’application des principes énoncés issus du jugement phare de la Cour d’appel de l’Ontario dans l’affaire Waksdale v Swegon North America Inc., 2020 ONCA 391 (Waksdale), qui a entraîné l’inapplicabilité de la plupart des clauses de licenciement.
Points à retenir
- Les clauses de mise à pied sont distinctes des clauses de licenciement : Lorsqu’un contrat de travail permet expressément les mises à pied temporaires, l’employeur qui se prévaut de ce droit conformément à la Loi de 2000 sur les normes d’emploi (LNE) de l’Ontario et des modalités du contrat n’est pas considéré comme ayant mis fin à l’emploi de l’employé visé, peu importe la validité de la clause de licenciement au contrat.
- Le fond l’emporte sur la forme : L’emplacement, dans un contrat, d’un libellé de mise à pied n’a pas d’incidence sur la question de savoir s’il constitue, ou non, une disposition de licenciement. Il ne s’agit pas d’établir où se trouve la disposition, mais plutôt de déterminer s’il s’agit, sur le fond, d’une disposition de licenciement.
La décision
Dans Taylor, le contrat de travail de l’employé comportait l’article suivant, intitulé « Licenciement » :
[TRADUCTION] Licenciement
Salytics peut mettre fin à votre emploi à tout moment pour un motif valable.
Elle peut en outre mettre fin à votre emploi sans motif à tout moment moyennant, à titre limitatif, le préavis minimal prévu par la loi ou l’indemnité en tenant lieu ainsi que l’indemnité de cessation d’emploi requise par la Loi de 2000 sur les normes d’emploi, sauf dans la mesure où une mise à pied sans motif s’avère nécessaire dans les six premiers mois de votre emploi, le cas échéant vous continuerez de toucher votre salaire jusqu’à la fin de cette période de six mois.
Si une mise à pied temporaire s’avère nécessaire, celle-ci pourra s’effectuer conformément aux exigences de la Loi de 2000 sur les normes d’emploi.
En 2024, Salytics a connu des difficultés financières. L’employé avait d’abord accepté une réduction temporaire de ses heures de travail et de son salaire, mais les déboires financiers de la société se sont aggravés, et l’employé s’est vu mis à pied temporairement à compter du 1er avril 2024. L’employé n’a touché aucun salaire pendant sa mise à pied, mais il a continué de bénéficier de ses avantages sociaux. L’employé a reçu un avis de rappel le 6 septembre 2024 et a repris ses fonctions le 30 septembre 2024 (soit après 26 semaines).
Le 19 juillet 2024, l’employé a saisi la Cour afin de faire déclarer qu’il avait été licencié et d’obtenir des dommages-intérêts tenant lieu de préavis. Invoquant le raisonnement dans Waksdale, il a soutenu que la disposition de mise à pied de son contrat était en fait une disposition de licenciement. En effet, comme les expressions « pour un motif valable » et « sans motif » ne cadraient pas avec la LNE, il tient celles-ci – et partant, la disposition de mise à pied – pour invalides. L’employé a insisté sur le fait que le libellé de mise à pied était intégré à l’article « Licenciement » du contrat et qu’en common law, une mise à pied constitue un licenciement déguisé, et donc un licenciement.
La Cour a rejeté la demande de l’employé, de même que la proposition voulant que le libellé de mise à pied de son contrat de travail constitue une disposition de licenciement. Elle a conclu que l’intégration de la disposition de mise à pied à l’article « Licenciement » n’était pas pertinente, en ce que conclure autrement reviendrait à faire primer la forme et l’emplacement du libellé sur sa substance.
De même, la Cour a rejeté l’argument voulant que le fait qu’une mise à pied unilatérale constitue un licenciement déguisé en common law fasse nécessairement en sorte que la disposition de mise à pied d’un contrat de travail équivaut à une disposition de licenciement. À cet égard, elle a souligné qu’une mise à pied constitue un licenciement [TRADUCTION] « lorsqu’aucune clause ne permet à l’employeur de mettre l’employé à pied ». Toutefois, lorsqu’on retrouve une clause permettant à l’employeur de mettre à pied un employé temporairement, l’employeur n’agit pas unilatéralement lorsqu’il s’en prévaut, et on ne peut donc pas parler de licenciement déguisé (et donc d’un licenciement).
Enfin, la Cour a rappelé que le paragraphe 56 (4) de la LNE prévoit explicitement qu’une mise à pied temporaire n’est pas un licenciement. Dans cette affaire, la durée de la mise à pied de l’employé était conforme aux dispositions de la LNE sur les mises à pied temporaires.
Conclusion
Taylor met en lumière l’importance du fond par rapport à la forme dans l’interprétation d’un contrat de travail. La Cour a clarifié qu’une disposition contractuelle, même intégrée à l’article de licenciement d’un contrat d’emploi, n’est pas en soi une disposition de licenciement. La validité et l’applicabilité doivent en être évaluées indépendamment des dispositions de licenciement du contrat. La décision Taylor réitère en outre que l’employeur qui prévoit une disposition de mise à pied claire et explicite dans ses contrats de travail (et qui respecte les exigences de la LNE en matière de mise à pied) peut effectuer une mise à pied temporaire sans être considéré comme ayant mis fin à la relation d’emploi. Les employeurs doivent veiller à ce que leurs contrats de travail soient soigneusement rédigés, de sorte à refléter cette distinction, et les employés devraient être conscients des incidences de ces dispositions.
Bennett Jones détient des connaissances et une expérience considérables en droit du travail, et peut aider votre entreprise quant à toute question ou préoccupation relative à l’applicabilité de dispositions de licenciement, ou en matière de travail ou d’emploi. Pour en savoir plus, communiquez avec les auteurs ou un membre du groupe Droit du travail et de l’emploi de Bennett Jones
Traduction alimentée par l’IA.
Veuillez noter que cette publication présente un aperçu des tendances juridiques notables et des mises à jour connexes. Elle est fournie à titre informatif seulement et ne saurait remplacer un conseil juridique personnalisé. Si vous avez besoin de conseils adaptés à votre propre situation, veuillez communiquer avec l’un des auteurs pour savoir comment nous pouvons vous aider à gérer vos besoins juridiques.
Pour obtenir l’autorisation de republier la présente publication ou toute autre publication, veuillez communiquer avec Amrita Kochhar à kochhara@bennettjones.com.