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Les locataires se méfient : les risques liés aux obligations fiscales des propriétaires

05 février 2024

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Écrit par Zachary Thacker and Michelle Yung

Dans 3792391 Canada Inc. c. Le Roi, 2023 CCI 37, la Cour de l’impôt a conclu qu’un contribuable locataire était responsable du défaut de retenir l’impôt sur les loyers versés à son propriétaire non-résident, même si le contribuable ne savait pas que son locateur était un non-résident aux fins de l’impôt canadien. La décision met en garde contre le fait que les locataires devraient s’informer du statut de résidence de leur locateur ou agir pour se protéger dès le début de leur bail, car sinon, ils pourraient encourir une obligation fiscale importante.

Partie XIII de la Loi de l’impôt

En règle générale, la partie XIII de la Loi de l’impôt sur le revenu (Canada) (la Loi de l’impôt) prélève un impôt sur certains types de revenus payés à des non-résidents par un résident du Canada.1 L’alinéa 212(1)d), par exemple, impose une retenue d’impôt de 25 % sur le loyer brut payé pour l’utilisation ou le droit d’utiliser un bien au Canada appartenant à un particulier non-résident. 2 Pour assurer la conformité à la partie XIII, il incombe au payeur résidant au Canada de retenir et de verser les montants appropriés lorsqu’il effectue des paiements à des non-résidents. En vertu du paragraphe 215(6), par exemple, un locataire qui omet de retenir et de verser le montant approprié est redevable de cet impôt en vertu de la partie XIII, ainsi que des pénalités et des intérêts accumulés en vertu de celle-ci.

Les faits

L’affaire concernait 3792391 Canada Inc. (l’appelante) et Siscoe, un actionnaire de l’appelant. En mai 1996, Siscoe a conclu un bail pour sa résidence personnelle avec Anjar Investments Ltd. (Anjar). En 2006, au courant de Siscoe, la propriété louée a été vendue par Anjar à Trimarchi. En 2010, Siscoe a conclu un bail de trois ans pour la propriété avec Trimarchi comme propriétaire. De 2011 à 2016, l’appelant a effectué des paiements de location à Trimarchi au nom de Siscoe et aucun impôt de la partie XIII n’a été retenu sur ces paiements. Siscoe a affirmé qu’en tout temps, il ne savait pas que Trimarchi était peut-être un non-résident du Canada. 

Le ministre a établi une cotisation à l’égard de l’appelant en vertu du paragraphe 215(6) pour défaut de retenir et de verser l’impôt de la partie XIII sur le revenu de location reçu par Trimarchi pour les années d’imposition 2011 à 2016, y compris les intérêts et les pénalités, au motif que Trimarchi était un non-résident du Canada. 

Analyse

La Cour a d’abord effectué une analyse de la résidence de Trimarchi, concluant qu’elle était une non-résidente du Canada pour les années d’imposition 2011 à 2016 en question.

La question centrale, à laquelle l’appelant a soutenu, était que pour que l’article 215 de la Loi de l’impôt soit applicable, le payeur canadien résident doit savoir que le bénéficiaire était un non-résident du Canada. Toutefois, en examinant l’historique législatif du paragraphe 215(6), la Cour a conclu qu’il n’y avait pas d’exigence de connaissance lorsque la disposition de retenue a été introduite initialement, et qu’aucune exigence relative aux connaissances n’a été ajoutée au texte depuis. Que, si le législateur voulait limiter la responsabilité d’un payeur aux circonstances dont il avait connaissance, il l’aurait expressémentfait dans le cadre de la disposition. En se fondant sur cette analyse, la Cour a statué que le paragraphe 215(6) est « dépourvu de toute exigence selon laquelle le payeur doit savoir que le bénéficiaire est un non-résident ». Par conséquent, après avoir conclu que Trimarchi était un non-résident du Canada, malgré son manque de connaissances, l’appelant a été jugé responsable d’avoir omis de retenir et de verser l’impôt de la partie XIII payable sur le loyer payé à Trimarchi, en plus de la responsabilité des pénalités et des intérêts.

En interdisant à l’appelant de se fier à un moyen de défense fondé sur la diligence raisonnable à l’égard de l’obligation prévue à la partie XIII, la Cour a statué que l’obligation générale de retenir et de verser de l’impôt en vertu du paragraphe 215(6) ne peut pas être interprétée comme prévoyant l’acceptation d’un moyen de défense fondé sur la diligence raisonnable de la part du contribuable. Bien que l’appelant ait pu se fonder sur un moyen de défense fondé sur la diligence raisonnable uniquement pour les pénalités et les intérêts imposés, la Cour a conclu qu’une telle diligence suffisante n’avait pas été établie. Cela a été fait malgré le fait que Trimarchi a fourni une adresse canadienne sur l’ordre de vente de 2006 pour la propriété, que la Cour a soutenu n’était pas suffisante pour que l’appelant s’appuie sur pour déterminer le statut de résidence de Trimarchi. Citant Kau c R, 2018 CCI 156, la Cour a déclaré qu’une telle déclaration quant à la résidence n’est pas concluante, intentionnellement ou non, et ne devrait pas être acceptée sans condition lorsqu’il n’y a pas d’autre enquête pour savoir si l’adresse fournie était en fait indicative de la résidence.

Principaux points à retenir

Comme on l’a vu dans cette affaire, les réalités de la partie XIII de la Loi de l’impôt peuvent être sévères, et il est de plus en plus important pour les locataires, tant commerciaux que résidentiels, de se protéger lorsqu’ils concluent des baux.

Dans les situations où il peut être difficile de déterminer le statut de résidence d’un locateur, les locataires devraient s’assurer qu’ils font preuve d’une diligence raisonnable suffisante en ce qui concerne la résidence du locateur. Par exemple, lorsqu’une déclaration est fournie par le locateur quant à son statut de résident, les locataires ne devraient pas se fier uniquement à une telle déclaration. Les locataires devraient plutôt mener leur propre enquête pour déterminer si la déclaration fournie est vraiment indicative du statut de résidence du locateur.

De plus, lorsqu’ils concluent des baux, les locataires doivent s’assurer que l’accord contient suffisamment d’engagements de protection et de représentations du locateur en ce qui concerne la partie XIII de la Loi de l’impôt. Les engagements et les représentations du locateur peuvent inclure, entre autres :

Selon le pouvoir de négociation comparatif du locataire, il peut également être prudent pour le locataire de demander une indemnité au locateur pour toute responsabilité découlant de la partie XIII et des retenues d’impôt, ainsi que pour toutes les pénalités et tous les intérêts connexes.

Si vous avez des questions concernant les implications potentielles de cette décision, ou de toute autre question de location commerciale, veuillez contacter un membre de Bennett Jones Commercial Real Estate group ou Tax group


1 Sauf indication contraire, tous les renvois législatifs aux présentes se rapportent aux dispositions de la Loi de l’impôt.

2 Le taux de retenue en pourcentage est assujetti aux traités applicables entre le Canada et le pays de résidence des non-résidents et peut être réduit en vertu de ceux-ci.  

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